08 février 2009

Interview politique DNA 8 février 2009





















Jacques Fernique : « Avec le PS nous serons au rendez-vous de l'alternance en Alsace aux prochaines régionales. » (Photo DNA - Christian Lutz-Sorg)

Région - Interview / Jacques Fernique, secrétaire régional des Verts

« Sarkozy et Fillon sont à côté de la plaque »

Jacques Fernique, secrétaire régional des Verts Alsace depuis quelques mois, est également conseiller régional d'Alsace et conseiller municipal de Geispolsheim. Après le plan de relance et avant la réforme territoriale, le point sur les déceptions et les attentes de l'écologie politique.


- DNA : Quelle est votre appréciation sur les retombées alsaciennes du plan de relance et l'intervention de Nicolas Sarkozy jeudi soir ?


- Jacques Fernique : Fillon et Sarkozy ont fait avant tout de la communication, un grand cinéma médiatique. Mais il n'y a vraiment rien de neuf dans les tuyaux. Beaucoup de projets étaient déjà programmés, voire en cours, par exemple la troisième voie de chemin de fer entre Benfeld et Strasbourg, le tram-train Mulhouse-Thann. On a ressorti des projets, comme la rocade Sud de Strasbourg, qu'on ne faisait même plus figurer dans le contrat triennal. Mais que signifient ces 2,5 millions d'euros pour un projet dont on sait qu'il coûtera 60 M € ? Autre esbroufe, les 800 M € affichés pour trois autoroutes concédées, dont le GCO (grand contournement ouest).



Depuis la crise financière,le Grenelle a été détricoté



Faut-il en conclure que ce GCO bénéficiera largement de financements publics, alors qu'on nous a toujours assurés du contraire ? Quant aux transports collectifs en milieu urbain, l'État s'est désengagé à partir de 2002. Ce qui est annoncé aujourd'hui ne suffit même pas à assurer le rattrapage.


- Vous êtes en train de dire que le président et le gouvernement sont à côté de la plaque ?


- Absolument. Dans son discours de conclusion du Grenelle de l'environnement, Nicolas Sarkozy a dit en gros qu'on n'investira plus dans la route et dans l'aérien que lorsqu'il n'y aura pas moyen de faire autrement. Hélas, depuis la crise financière, le Grenelle a été détricoté.


- Quelle forme devrait prendre, au niveau régional, la relance et le « green deal » ?


- Le premier vrai enjeu est la mutation nécessaire de l'agriculture. La Région Alsace fait ce qu'elle peut pour promouvoir le bio et les labels de qualité. Mais c'est peanuts à côté des politiques cogérées par le monde agricole et l'État. Nous sommes en train de nous battre pour qu'on ne fasse pas n'importe quoi dans! le domaine de la couverture des sols en hiver (des cultures intermédiaires faisant office de piège à nitrates), assurée à environ 45 % en Alsace. On veut désormais compter les labours profonds comme couverture hivernale. Une aberration.


L'autre enjeu, c'est l'investissement massif dans l'efficacité énergétique, la réhabilitation thermique, le développement des énergies renouvelables et les transports en commun de qualité. La Région Alsace manque malheureusement de poids, politique et financier.


- Justement, qu'attendez-vous de la réforme territoriale ?


- Les Verts ont des propositions, inspirées notamment de pays européens voisins. Nous sommes favorables à trois grands pôles. La commune, qui doit rester la cellule de base de la démocratie locale, là où se joue la vraie proximité, mais il ne faut pas non plus l'ériger en mythe. A l'échelon supérieur, l'intercommunalité, pour laquelle il faudra trouver un maillage cohérent. Elle est en charge de questions importante! s comme l'urbanisation, l'occupation des sols, le développement économique. Les conseillers intercommunaux devraient être élus au suffrage universel, dans une circonscription unique. Enfin, troisième niveau, la Région, avec une clause de compétence générale. Elle doit avoir une vraie compétence pour tout ce qui est formation, éducation, qualification, du primaire à l'université. Qu'on arrête de découper le champ éducatif en morceaux. Le ferroviaire, les grandes décisions stratégiques sur l'aménagement du territoire devront être les autres compétences majeures de la Région.


- Que devient le Département ?


- Il disparaît en tant que niveau politique, sans être entièrement supprimé pour autant. Nous sommes favorables à une Région bicamérale, selon le système proposé par le député européen des Verts Gérard Onesta (DNA du 25 janvier). Les deux assemblées composant la Région choisiraient ensemble un exécutif, qui serait déconnecté du "législatif". Dans ce domaine l'Alsace dev! rait renouer avec une culture rhénane : le bicamérisme fonctionne en Allemagne, et partout en Europe. Cependant, j'ai peur que la réforme territoriale ne donne pas grand chose, parce que la droite va s'étriper sur le mode de scrutin. Pour nous, un système proportionnel à deux tours avec une prime majoritaire, comme c'est le cas actuellement pour le conseil régional, serait parfait pour les trois niveaux. Mais nous sommes absolument contre toute idée de cantonalisation de la Région.



L'alliance se fera à gauche



- Aux régionales, vous ferez-vous à nouveau équipe avec le PS ?


- Notre orientation stratégique est de réussir le rendez-vous avec l'alternance dont l'Alsace a besoin. Ferons-nous liste commune avec le PS dès le premier tour ou proposerons-nous des listes autonomes avec fusion au second tour comme aux municipales de Strasbourg ? Ce n'est pas encore fixé. En tout cas l'alliance se fera à gauche. A droite aussi, il y a des gens sensibles ! à l'écologie, mais il n'ont pas le vent en poupe au sein de leurs partis.



Claude Keiflin
© Dernières Nouvelles d'Alsace - 8.2.2009